Les régurgitations, les reflux, les vomis, chaque parent a connu ou va connaitre ces désagréments.
En observant les études réalisées sur des enfants de 0 à 18 mois, on constate que la moitié des nourrissons de 3 mois régurgitent au moins une fois par jour, et que 23% des enfants régurgitent au moins 4 fois par jour à 5 mois, contre 7% des enfants de 7 mois. La plupart du temps le reflux est une manifestation normale, physiologique qui diminue avec le temps, la nourriture et par l’acquisition de la posture verticale.
Seulement, parmi ces statistiques, il y a des bébés pour qui ce phénomène douloureux est quotidien. La remontée chronique et passive du contenu gastrique occasionne des douleurs, les symptômes disparaissent dans une grande majorité des cas autour de 1 an.
Pour autant nous pouvons accompagner ces bébés et essayer de leur apporter un peu de douceur. Et nous allons voir ensemble ce que nous pouvons faire en fonction de plusieurs critères.
Mais commençons par le commencement :
Qu’est-ce que le RGO ?
Un Reflux Gastro Œsophagien, c’est un trouble digestif qui touche la région de l’estomac et de l’œsophage et c’est la première cause des vomissements pendant la petite enfance. Concrètement il s’agit d’une remontée involontaire du contenu gastrique vers l’œsophage.
Les vomissements sont le signe le plus visible et celui qui alerte le plus fréquemment pour le RGO, certains parents utilisent le terme « geyser » pour décrire le phénomène. Seulement ce n’est pas toujours aussi visible et il arrive aussi que ces reflux ne sortent pas, le liquide remonte de l’estomac vers l’œsophage puis redescend, on parle alors de reflux interne et il occasionne encore plus de douleur chez les tout petits.
Nous faisons la distinction entre deux natures de reflux gastro-œsophagien :
Le premier RGO est le reflux dit physiologique : Une régurgitation se produit sans que bébé ne paraisse gêné, il s’agit d’un « trop plein ». Elle arrive juste après la tétée ou le biberon. Ces renvois sont normaux et se réduisent avec l’âge. Ce reflux physiologique est lié à l’incompétence fonctionnelle du système digestif de l’enfant et surtout à la quantité importante de lait ingéré par rapport au poids du bébé. A titre d’exemple, c’est comme si une personne de 67kg buvait un peu plus de 8 litres de lait par jour !
Le second reflux gastro-œsophagien est le reflux dit pathologique : Ce reflux arrive à distance des repas et occasionne de la douleur chez les tout petits à cause de l’acidité du contenu qui remonte et qui peut aller jusqu’à provoquer une inflammation et des infections comme des œsophagites, otites, rhino-pharyngites ou gastrites.
Quelles sont les causes du RGO ?
Le reflux peut avoir une origine mécanique : un sphincter qui se referme mal par exemple et qui laisse circuler plus ou moins librement les liquides entre les organes, même lorsque la digestion a débuté. Les muscles peuvent connaître un dysfonctionnement ou une immaturité. Le RGO peut aussi avoir une origine allergique, alimentaire par exemple. Et parfois la cause du reflux est un mélange des deux.
Il est intéressant de savoir, dans le cas d’un allaitement maternel, que certains aliments semblent avoir un impact sur le tonus du sphincter œsophagien comme : le chocolat, les aliments riches en gras. D’autres aliments augmentent la production d’acide dans l’estomac comme la tomate, les agrumes. Pensez-y si, vous-même, vous souffrez de reflux, car il peut s’avérer utile d’avoir une attention particulière à son l’alimentation.
Le reflux peut aussi être cyclique, c’est-à-dire qu’il peut diminuer et revenir par crises lors, par exemple, de poussée dentaire ou de rhumes…
Comment savoir si mon bébé à un RGO ?
Il convient d’observer son bébé, vous pouvez noter vos observations pour pouvoir vous y référer, lorsque vous consulterez votre médecin par exemple.
Voici des exemples de ce que vous pouvez observer : - Mon bébé vomi combien de temps après le repas ? - Quel est son comportement pendant le repas ? Le repas est fractionné, bébé gigote, râle, … - Est-ce que mon bébé vomi « en jet » ? - Bébé fait des bruits / ronfle ? Le jour, la nuit ? - Se jette en arrière ? Dans quels contextes ? - Se réveille la nuit ? Combien de fois par nuit ? Est-ce qu’il hurle et/ou se calme rapidement ? - Il tousse souvent ? A souvent le nez pris ? (Précisez le « souvent » sur vos observations, est-ce chaque jour, semaine, mois ? Combien ? Comment vous le prenez en charge ? Comment il réagit ?) - Bébé tête sa langue, tire la langue ? - Quelle est sa position pendant son sommeil ? - Les poings sont fermés ? Les sourcils froncés ? - …
Quels sont les symptômes ? Cette liste est volontairement non-exhaustive car les manifestations du RGO diffère d’un enfant à l’autre. Ces seuls symptômes ne suffisent pas à diagnostiquer un reflux gastro œsophagien. Soyez attentifs également à la posture de votre bébé.
Les bébés souffrant de reflux gastro-œsophagien peuvent : - avoir beaucoup de rots, - être ballonnés - tousser souvent, la nuit aussi. La voix peut être rauque - être irritable - ne plus vouloir s’alimenter ou s’alimentent plus que de raison, - avoir la respiration sifflante - ne pas supporter d’être posés à plat dos, - ne pas supporter d’être dans le cosy, les trajets en voiture sont plus que compliqués - se jeter en arrière - être difficile à porter dans les bras C’est pourquoi si vous pensez que vote bébé souffre de RGO : consultez votre médecin
Les complications possibles du RGO sont liées à son abondance, son acidité, la maturation du bébé. Les conséquences peuvent être de l’ordre de l’inflammation avec une œsophagite, ulcère avec des plaies qui peuvent saigner et entrainer une anémie, un rétrécissement de l’œsophage (sténose), les enfants peuvent rencontrer ensuite des troubles de l’oralité.
La prise en charge
Il est important de noter et décrire le plus précisément possible vos observations en ce qui concerne les habitudes de votre enfant, ses comportements, les quantités, fréquences, heures, … Ceci afin d’avoir une description la plus utile et factuelle possible, ce qui aidera au diagnostic.
En premier lieu, et après avoir exploré avec vous les antécédents, les symptômes, il vous sera proposé un accompagnement qui débute avec des mesures dites hygiéno-diététiques, cela inclus l’épaississement du lait en poudre, le changement d’eau, ajustement des volumes de lait, des recommandations sur les manipulations de bébé, l’introduction de nourriture solide, …
Vient, dans un second temps et si les actions menées en première intention ne suffisent pas, un traitement. Il est défini par le médecin en fonction de différents critères comme : l’âge de l’enfant, la santé globale, l’étendue des symptômes, les antécédents, les attentes thérapeutiques, vos préférences, et les résultats de différents examens comme par exemple une radiographie, endoscopie, pHmétrie. Il peut être nécessaire d’ajuster les médicaments en cours de traitement. La prise en charge médicamenteuse du reflux gastro-œsophagien a pour principal objectif de réduire les symptômes ce qui permet de diminuer le risque de survenue de complications. C’est le cas de médicament qui agit en protection de la muqueuse œsophagienne contre l’acidité gastrique comme une barrière par exemple. Le traitement permet, dans certains cas, de diminuer l’acidité et ainsi réduire les brulures, de réduire le nombre de reflux en agissant sur la durée de digestion, leur fréquence. Quelques fois il est nécessaire de supplémenter en calories lorsque la prise de poids de bébé est impactée par le RGO.
Puis, dans de très rares cas, il peut être proposé une intervention chirurgicale. Ce sont les cas de bébés avec certains handicap moteur ou avec des conséquences qui risque de devenir lourdes.
Ce que vous pouvez faire à la maison :
- Consultez des professionnels spécialisés en pédiatrie/rgo comme les : micro-kinésithérapeute, ostéopathe, kinésithérapeute, chiropracteur, étiopathe, orthophoniste. Ce sont des approches différentes et qui ont des effets bénéfiques sur de nombreux enfants ;
- PORTEZ votre bébé en position verticale, dans les bras ou dans un moyen de portage physiologique. Vous pouvez contacter votre monitrice de portage pour vous faire aider si besoin, et prévenez-la du RGO ou de votre suspicion de RGO car certaines monitrices (et moniteurs) sont spécifiquement formées et pourront vous apporter en plus du portage des pistes pour améliorer votre quotidien ;
- Adoptez des vêtements souples qui ne compriment pas le ventre, attention à ne pas trop serrer la couche également ;
- Relevez la tête du lit, avec conseils du professionnel qui suit votre enfant afin de limiter le risque que l’enfant ne glisse au pied du lit. Il existe aussi des systèmes de matelas inclinés (proclive pouvant atteindre une inclinaison de 30°) où l’enfant est ainsi couché et sécurisé. Parlez-en avec votre médecin ;
- Introduisez les aliments solides, toujours avec l’accord de votre médecin, et en fonction de l’âge de votre bébé ;
- Evitez les aliments acides comme les yaourts, les agrumes, les tomates, le chocolat. Attention à certains médicaments qui utilisent des huiles essentielles d’agrumes ou du lactose pouvant favoriser du reflux lors de terrain sensible, intolérant ou allergique ;
- Fractionnez les repas, de plus petites quantités mais plus souvent ;
- Ne fumez pas en présence de l’enfant ;
- Faites surveiller les freins de lèvres, de langue. Ils peuvent avoir des conséquences sur tout le corps ;
- Faites-vous aider à la maison ET avec votre bébé lorsque c’est possible ;
- Allaitez à califourchon ou en position semi assise et laissez bébé gérer le nombre de tétée, la durée… Laisser bébé téter lorsqu’il n’y a plus de lait permet de faire fonctionner les muscles de l’œsophage et aide ainsi le contenu à cheminer ;
- Donnez le biberon en faisant attention à ce que bébé avale le moins d’air possible, pour cela veillez à ce que la tétine soit remplie de lait tout en gardant le biberon le plus horizontal possible ;
- Manipulez votre bébé doucement et en le soutenant par sa base ;
- Attendez après la fin du repas avant de coucher bébé.
En conclusion,
Si votre bébé souffre de reflux gastro œsophagien armez-vous de patience et entourez-vous de personnes de confiance et bienveillantes, votre famille, vos ami.es, des professionnel.es. Ces enfants pleurent beaucoup, il est normal de se sentir démunie. Ne restez pas seule, parlez-en autour de vous, consultez et surtout FAITES-VOUS CONFIANCE ! Vous êtes la personne qui passez le plus de temps avec votre bébé, si vous sentez que quelque chose cloche observez et parlez-en.
Angélique PERICHON,
Accompagnante parentale, monitrice de portage et formatrice à Clermont-Ferrand (63)
Quelques références : The natural course of gastro-oesophageal reflux. Acta paediatr ; Prevalence of symptoms of gastroesophageal reflux during infancy : A pediatric practice based- approach. Pediatric practice research group. Arch Pediatr Adolesc Med 1997 ;Hyman PE, Milla PJ, Benninga MA, et al. Childhood functional gastrointestinal disorders: neonate/toddler. Gastroenterology 2006;130:1519-26 ; Iacono G, Carroccio A, Cavataio F, et al. Gastroesophageal reflux and cow’s milk allergy in infants: a prospective study. J Allergy Clin Immunol 1996;97:822-7 ; Saint-Maurice D, Michaud L, Guimber D, et al. pH-métrie œsophagienne et manifestations respiratoires récidivantes de l’enfant : est-il possible de limiter l’enregistrement à la période diurne ? Arch Pediatr 2002;9:1236-40 ; Wenzl TG, Moroder C, Trachterna M, et al. Esophageal pH monitoring and impedance measurement: a comparison of two diagnostic tests for gastroesophageal reflux. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2002;34:519-23 ; L’art de l’allaitement maternel, la leche league france, 2009 Orenstein SR, Hassall E, Furmaga-Jablonska W, et al. Multicenter, double-blind, randomized, placebo-controlled trial assessing the efficacy and safety of proton pump inhibitor lansoprazole in infants with symptoms of gastroesophageal reflux disease. J Pediatr 2009;154:514-20 ; Gastro-oesophageal reflux disease: recognition, diagnosis and management in children and young people. National Institute for Health and Care Excellence (NICE), 14/01/2015.
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